Une expérience autour de l’évaluation positive en REP + : visite de Guy CHARLOT, Directeur Académique à l’école OLIVIER DE SERRES-CARRETTE, Roubaix, Février 2017
L’évaluation dans le système éducatif français soulève deux enjeux majeurs : réduire les inégalités scolaires et favoriser la réussite de tous. Inscrite dans la loi de refondation, l’évaluation doit permettre à chaque élève d’identifier ses acquis et ses difficultés afin de pouvoir progresser.
Dans cette perspective, l’évaluation a été repensée, depuis la rentrée scolaire 2014, dans la classe de double niveau CE1 CE2 de Madame VANDEWALLE Camille comme un véritable outil d’apprentissage.
Les objectifs de la maîtresse sont clairement identifiés : rendre l’élève totalement acteur de son évolution, proposer un nouveau type d’organisation et utiliser le livret de compétences au quotidien en en faisant un outil instantané et en temps réel de la mesure des acquisitions de l’élève.
Les objectifs de l’élève le sont tout autant : prendre conscience de ses acquis, ses progrès et ses difficultés de manière positive et bienveillante, vivre l’évaluation comme un outil au service de ses apprentissages et de ses progrès, gagner en autonomie, devenir responsable de son parcours en utilisant le livret de compétences au quotidien. L’élève est ainsi associé à son évaluation.
Déroulement d’une demi journée type :
Les élèves sortent leurs cahiers de rituels. Les exercices d’entrainement sont inscrits au tableau. L’enseignante prend un temps pour présenter et expliquer les exercices. Elle précise bien à chaque fois quelles compétences du livret sont travaillées. Les consignes comprises par tous, les élèves se mettent au travail seuls. Des carnets d’aide sont toujours à disposition.
Lorsque les rituels sont en place, l’enseignante peut alors individualiser le travail : elle sort le cahier d’inscriptions aux évaluations. A son bureau, elle appelle un par un les enfants inscrits la veille. L’élève se voit expliquer son évaluation. L’enseignant peut alors sentir si l’enfant est à l’aise ou pas. Il peut le cas échéant, lui proposer de lui lire les phrases (pour le « non-lecteur ») ou lui proposer de travailler avec le carnet d’aide (c’est alors stipuler sur l’évaluation « avec carnet d’aide »). L’enfant retourne alors à sa place avec son évaluation.
Les élèves vont et viennent auprès du professeur dans un calme absolu pour :
-faire corriger l’évaluation qui vient d’être passée. Il se passe là un temps privilégié entre l’enseignant et l’enfant. La correction se faisant dans l’instant, les idées sont encore « fraiches » dans la tête de l’élève. Un retour aux outils de la classe permet à l’élève de prendre conscience de ses progrès ou des erreurs le cas échéant. On peut alors ensemble fixer la notation. Il s’agit à ce moment-là pour l’enseignant, d’encourager, de féliciter, de remotiver l’élève. A noter qu’une évaluation « ratée » peut être repassée à tout moment, en période 1, 2 ou 3. L’évaluation n’est pas une note sanction et peut être recommencée. Dans chaque cahier d’évaluations, l’enseignante spécifie par un code couleur qu’une notion a été abordée et qu’à partir de là, l’élève peut se proposer à l’évaluation quand il s’y sent prêt, le jour même, le lendemain. La phase d’évaluation n’est donc plus imposée mais choisie par l’enfant lui-même, ce qui lui change totalement sa perception de l’évaluation.
– Demander de l’aide à l’enseignant. L’enfant sollicite l’enseignant s’il est confronté à des difficultés lors des exercices d’entrainement (rituels) ou lors des évaluations (l’enseignant précise alors « aidé» sur le cahier ou l’évaluation).
La correction des exercices ritualisés, tout comme l’évaluation se fait dans l’instant et de façon individualisée. Une fois la correction terminée, le maître peut alors préciser : « Te voilà prêt pour cette compétence !», l’objectif étant d’influencer l’enfant à s’inscrire ou « Tu pourras encore t’entraîner lors des prochains rituels ».
L’erreur est considérée comme une étape de l’apprentissage, nécessaire et source d’enseignements pour tous. L’apprentissage n’est pas un processus linéaire. Il passe par essais, tâtonnements, erreurs, échecs… Il y a donc pour les élèves un droit à l’erreur qui est reconnu et pris en compte. Le travail sur l’erreur permet d’instaurer un climat de confiance dans lequel l’erreur n’est plus stigmatisée mais devient un matériau collectif pour la construction du savoir.
Une correction collective des rituels est réalisée une fois toutes les évaluations terminées et corrigées. Les élèves ayant réussi leurs rituels n’ont pas l’obligation de participer à cette correction. (coin lecture / coin mathématiques / coin sciences …) Ce dispositif d’évaluations individuelles est mis en place chaque matin de 8H15 à 9H30. Il s’inscrit dans la démarche d’apprentissage en Français et en Mathématiques prévue sur un volume quotidien de 75 minutes.
Ce dispositif d’évaluation ne s’arrête pas aux portes de l’école. L’enseignante a élaboré également un site d’entraînement où chaque élève peut accéder à une batterie d’exercices à la maison, le préparant à l’évaluation. Ce sont les élèves eux-mêmes qui ont réclamé à leurs parents de pouvoir y travailler avec eux à la maison. Cela permet ainsi de développer une pratique de coéducation dans et hors de l’établissement.
Certains effets ont déjà été constatés : rendre explicite le processus d’apprentissage permet d’ancrer les notions apprises dans la durée, et rendre les élèves autonomes. L’équipe enseignante, soutenue par le directeur de l’école, Monsieur Jean Luc MONTOIS, interroge ses propres pratiques en matière d’évaluation. Une réflexion collective sur le développement progressif de l’autonomie au cycle 2 s’est engagée…